Mieux gérer les stocks et limiter le gaspillage : les solutions venues du terrain

Le travail en amont est plus qu'essentiel : un stock optimal = des commandes réussies.
Mieux gérer les stocks et limiter le gaspillage : les solutions venues du terrain

Le gaspillage alimentaire est une problématique qui concerne tout le monde en magasin. Depuis des années, les équipes sur le terrain déploient de nombreux efforts pour optimiser leur gestion et limiter la casse autant que possible.

Pourtant, malgré les solutions déjà en place – comme les TG anti-gaspi, le stickage dates courtes, ou d'autres dispositifs – ces mesures restent souvent perçues comme des  « solutions de secours » destinées à pallier des dysfonctionnements en amont.

Afin de mieux cerner les pratiques efficaces et les points à améliorer, nous avons interrogé des professionnels en magasin pour recueillir leurs perspectives et solutions concrètes.

Une gestion des stocks plus rigoureuse et une rationalisation des références dans les rayons

De nombreux professionnels en magasin s’accordent sur l’importance d’une meilleure gestion des stocks. Selon cette cheffe de rayon, la lutte contre le gaspillage alimentaire commencer par « mieux gérer les stocks dans un premier temps ».  

Ils sont nombreux d'ailleurs à insister sur ces stocks et recommandent de rationaliser l'assortiment. Cette même cheffe de rayon recommande sans coup férir « d'arrêter certaines références qui ne se vendent pas ». D'autres sont plus précis et invitent à « supprimer toutes les références avec une vente moyenne inférieure à 1,5 ».

La taille de l'offre doit trouver un juste équilibre dans cette lutte contre le gaspillage. Cette surabondance de choix est souvent pointée du doigt. Comme le souligne ce chef de rayon, « quand on voit qu'il y a une centaine de références juste pour du jambon », il devient difficile pour les consommateurs comme pour les professionnels de s’y retrouver. Un confrère complète en avouant que certaines gammes poussent au gaspillage : « ça peut devenir vraiment n'importe quoi si on n’est pas vigilant : entre le premier prix, la marque distributeur, la grande marque, la version bio, le maxiformat, etc. , le client s'y perd, et nos stocks aussi », s'alarme-t-il.

Mieux commander et surtout accepter la rupture ! Il faut faire de la pédagogie auprès des clients sur ce point (un chef de rayon)

Pour construire un assortiment plus juste, il y a un travail important à faire en amont comme souligne ce gestionnaire : « il faut analyser les ventes, supprimer celles qui ne tournent pas, et placer stratégiquement certains produits pour qu’ils soient visibles en priorité. On doit chasser la casse », insiste-t-il.

Cette taille de l'assortiment est parfois même dénoncée par certains chefs de rayon d'enseigne intégrées qui doivent respecter des plans merchandising précis : «dans des enseignes, les magasins se fichent de la casse tant que les rayons sont pleins. En tant que manager, nous avions travaillé pour réduire la casse et favoriser l’anti-gaspi. Mais maintenant, les collaborateurs préfèrent passer directement en casse plutôt qu’en anti-gaspi. Résultat : on perd de l’argent, et les petits budgets aussi », alerte un chef de rayon.

La solution : « mieux commander et surtout accepter la rupture ! ». Entre un irritant client et la casse, on demande au magasin de choisir : « il faut faire de la pédagogie auprès des clients sur ce point. Si un produit est absent, on doit l'inviter à trouver un équivalent, en général ça fonctionne », remarque un chef de rayon.

Mieux commander et surtout accepter la rupture ! Il faut faire de la pédagogie auprès des clients sur ce point (un chef de rayon)

Valoriser l’anti-gaspillage avec des espaces dédiés

Pour écouler plus rapidement les produits à date courte, la solution entreprise par les magasins reste encore de valoriser ces produits. Autrefois cachés en fond de rayon, les magasins n'hésitent plus à concevoir des espaces dédiés.

Pour bon nombre de professionnels, supprimer les dispositifs anti-gaspillage serait une erreur : « enlever l'anti-gaspi pour moi est une grossière erreur, » affirme cette cheffe de rayon. Cette dernière rappelle que ces dispositifs sont essentiels pour les personnes en précarité : « je préfère que des personnes puissent profiter de ces baisses au lieu que ça finisse à la poubelle ! », remarque-t-elle.

 Les clients sont demandeurs de ces espaces, il ne faut surtout pas les supprimer ! »

Pour améliorer ces pratiques, un chef de rayon suggère d’anticiper : « il faut arrêter de mettre en anti-gaspi seulement les produits du jour et réfléchir à inclure les produits un ou deux jours avant en changeant la réduction. C'est du travail, mais c'est optimal ». Cette réduction progressive est d'ailleurs déjà appliquée dans certains magasins : « chez nous on passe à -25% à 2 jours avant la date, -50% le jour J, et on finit par mettre sur des applications comme ToGoodToGo ou Phenix, à partir de 15h, pas avant ».

Former et responsabiliser les équipes

Autre étape clé, la formation. Là encore, il y a un grand travail de sensibilisation à faire. Seul bémol, le turnover sur certains rayons : « on a des gens, ils restent 2 mois, tout au plus. On les forme et une fois partit, on doit recommencer avec un autre, c'est épuisant », souligne ici une cheffe de rayon. Celle-ci complète que « les heures d'absences sont un fléau en magasin : il suffit que quelqu'un manque, qu'on doit bâcler le travail, on est des humains, c'est normal de passer à côté d'un produit arrivé à date ».

Pour autant, les magasins misent sur la formation et l’implication des équipes comme étape déterminante dans la lutte contre le gaspillage. Pour ce chef de rayon, « tout cela est gérable avec une organisation mise en place, un minimum de formation des managers à leur équipe et une implication de tout le monde ». Il propose aussi de s’appuyer sur des outils comme les applications de gestion anti-gaspillage et des solutions externes comme Zéro-gâchis.

Pour ce directeur, le magasin va même encore plus loin en mettant en place une incitation financière pour motiver les salariés : « on responsabilise les salariés avec une prime pour éviter les ruptures/stocks ».

Miser sur la présentation et l’animation des ventes

Dernière étape clé, améliorer l’expérience client. Cela passe par « faire gouter les produits » ou de « proposer une petite promotion pour inciter les gens à essayer ». Cela « fonctionne sur les nouveautés dont les ventes ont parfois du mal à décoller », reconnait ce manager. On en revient sur la rationalisation de l'offre et la taille de l'assortiment. 


En résumé, la première étape dans la lutte contre le gaspillage réside dans le travail fait en amont, comme l'explique un chef de rayon : « ça passe par analyser son mix, ses ventes, ses positionnements de prix, quel que soit le rayon, c'est un fondamental du rôle de responsable de rayon ».

Tous les salariés reconnaissent qu'une gestion rigoureuse de la casse passe par des commandes optimisées et des assortiments équilibrés.