Comment dynamiser les rayons textiles ? Voilà une question qui fait beaucoup réfléchir les distributeurs. Le sujet est d’autant plus difficile, car :
- 1, l’inflation est passée par là et les Français font des arbitrages budgétaires ;
- et 2, on observe de nouvelles tendances de consommation. D’un côté on a des clients qui privilégient la fast-fashion et de l’autre on a ceux qui tendent vers la durabilité et qui s’orientent vers des solutions émergentes comme la Seconde Main
Nous sommes allés au siège de Carrefour à Massy pour découvrir le dispositif commercial imaginé par la FEEF qui sera disponible en magasin pour la collection automne/hiver.
Un marché du textile est « fragmenté », « challengé », « en transition » et « complexe »
Le marché du textile « est en décroissance depuis de nombreuses années en GMS », nous explique Olivier Collet, responsable des relations distribution au sein de la FEEF.
Plusieurs raisons cette décroissance : « On est dans une tendance de marché en régression forte depuis le début des années 2010 », précise Emmanuel Assouline, codirigeant de Sun City, « le marché du textile est en pleine transformation et est principalement lié à des mutations de mode de consommation et à la fragmentation de la distribution en France, la présence de nouveaux acteurs, des distributeurs, des pure players qui ont pris des parts de marché importantes », ajoute-t-il.
Ces concurrents on les connait. Ils s'appellent entre autres, Shein, Temu : « La concurrence principale du textile en France vient du grand import, des produits qui viennent d'Asie. Des acteurs comme Shein ou Temu qui ne bénéficient pas du même cadre règlementaire que les entreprises françaises », Michel Charmasson, DG commercial du groupe Eminence
Un partenariat inédit entre la FEEF et Carrefour
Pour répondre au marché, Carrefour a donné carte blanche aux entreprises textile de la FEEF pour imaginer un dispositif inédit. La Fédération des Entreprises et Entrepreneurs de France s'est appuyée sur la réalisation d'une étude Kantar. Cofinancée par la commission textile de la FEEF, cette étude visait à analyser les forces et les faiblesses du marché et déterminer des pistes de croissance pour relancer le textile en GSA : « elle nous a permis d'avoir une photographie de la situation du marché textile en France pour amener des solutions aux distributeurs », explique Emmanuel Assouline. « Cette étude a été partagée avec tous les distributeurs dont Locelyne Lecourt chez Carrefour qui a challengé nos adhérents en leur donnant carte blanche sur un projet de développement des ventes », ajoute Olivier Collet.
Concrètement, les entreprises adhérentes de la FEEF ont mis au point un dispositif en trois temps forts qui sera disponible en magasin pour valoriser la collection automne/hiver : « L'enjeu visait à créer une expérience client en magasin, de raconter une histoire, de donner du sens. On a travaillé en accord avec les équipes marketing de Carrefour. Le point clé était de réfléchir à une massification en point de vente et mieux traduire le concept en magasin », ajoute le Co dirigeant de Sun City. Le but : valoriser les productions françaises et encourager une consommation responsable.
« Cette opération avec la FEEF est inédit chez Carrefour », se félicite Jocelyne Lecourt, en charge du textile au sein de Carrefour. « Cette année nous avons voulu mettre les équipes de la FEEF en lien avec les axes stratégiques de Carrefour qui sont la mode responsable, l'inclusivité et la création de valeur », explique-t-elle. Le constat est de départ était que les fournisseurs « travaillaient habituellement en silo». L'idée de ce projet était « de réfléchir en collectif et faire travailler tout le monde ensemble pour partager nos expertises, nos valeurs ».
« Le plus important c'est d'aligner le non alimentaire et plus spécifiquement le textile aux valeurs de Carrefour qui sont les filières alimentaires, le local. C'était important d'avoir une cohérence sur les valeurs de l'enseigne », Jocelyne Lecourt, en charge du textile au sein de Carrefour
Faire résonner le made in France dans la distribution.
L'objectif même de ce dispositif est de valoriser les circuits courts. « Les consommateurs adorent les produits issus de nos belles entreprises françaises », explique Michel Charmasson, DG commercial du groupe Eminence tout en justifiant « la proximité avec l'ancrage local ». « Le made in France a besoin de visibilité, a besoin d'accessibilité, et le circuit numéro 1 qui permet cela c'est la grande distribution », ajoute-t-il.
L'impact d'un achat en France est multiple selon le DG d'Eminence :
- de 1, il va générer de l'emploi direct, mais aussi indirect « en soutenant l'économie locale »;
- de 2, il va « renforcer les liens sociaux qui vont être créés par une dynamique industrielle » ;
- et le 3ème est sur le plan environnemental, car « il va réduire l'empreinte carbone sur des produits fabriqués sur des circuits courts ».
Le constat est sensiblement le même pour Jean-René Duhourcau, directeur commercial CSP Paris : « acheter des produits français c'est l'assurance pour nos distributeurs de pouvoir promouvoir une marque engagée, au coeur de vos territoires », commente-t-il tout en nuançant : « acheter français fait partie des tendances à condition d'être compétitif en prix ».
Valoriser les entreprises françaises présente aussi des avantages notables pour la grande distribution : « le lien entre les entreprises françaises et les distributeurs offre la possibilité de vendre des marques nationales et régionales qui se caractérise par des innovations produites et des nouveautés qui permettent de dynamiser les linéaires ». Travailler avec une entreprise française « apporte de la souplesse et de la réactivité sur l'approvisionnement des magasins. L'autre avantage des entreprises françaises et de limiter l'empreinte carbone de par notre proximité territoriale. Tous nos clients sont livrés entre 24 et 72 heures maximum », résume Jean-René. Un argument complété d'ailleurs par Emmanuel Assouline :
« La réactivité est une marque de fabrique des entreprises de la FEEF. C'est l'agilité, la proactivité, l'écoute des marchés et d'agir de manière concertée pour amener un nouveau paradigme », amène Emmanuel Assouline