Afin de de favoriser l’économie circulaire, le gouvernement a officialisé début mars le lancement d’un label anti-gaspillage. Destiné aux acteurs de la GMS – grandes et moyennes surfaces – les grossistes et les métiers de bouche, ce label attribuera jusqu’à 3 étoiles aux entreprises les plus vertueuses. L’objectif : forcer tous ces différents acteurs à réduire de 50 % d’ici 2025 le gaspillage dans la distribution alimentaire.
Le fléau du gaspillage alimentaire en grande distribution
Tous les ans, près de 9 millions de tonnes* de denrées alimentaires (Chiffres du Ministère de la Transition écologique) sont jetées à la poubelle. Trop, beaucoup trop pour le Gouvernement, qui s’est pourtant fixé avec la « loi anti-gaspillage pour une économie circulaire » de 2016 plusieurs objectifs ambitieux. Parmi ceux-là, réduire de moitié (par rapport à 2015) le gaspillage alimentaire d’ici 2025 pour les secteurs de la distribution et de la restauration collective, et d’ici 2030 pour la consommation, la production, la transformation et la restauration commerciale.
2025, autrement dit demain, pour le secteur de la distribution. Afin d’accélérer les efforts en la matière, le Gouvernement a donc annoncé le 1er mars le lancement d’un nouveau label anti-gaspillage alimentaire. Le décret visant à activer la mise en place de ce dispositif national, défendu par le ministère de la Transition écologique, l’Ademe et l’Afnor SPEC, a été publié le même jour. Avec un objectif : être simple, clair, et facilement repérable.
Un label à trois niveaux
En fonction des « performances de réduction des déchets et du gaspillage » qu’elles mettront en place, les enseignes recevront de une à trois étoiles. Dans le détail
- une étoile soulignera « l’engagement » de l’enseigne,
- deux étoiles « la maîtrise »,
- trois étoiles « l’exemplarité ».
De nombreux critères seront pris en compte par l’organisme certificateur (indépendant de l’état) pour attribuer ce label :
- mise en avant de paniers anti gaspillage
- baisse de prix sur les produits dont la date de péremption approche
- Actions de dons en faveur des associations, aide aux démunis…
- etc.
Le logo que peut recevoir l’enseigne de distribution est différent selon le niveau atteint dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. Pour donner sa note, l’organisme indépendant évalue les différents critères en donnant un certain nombre de points. Pour qu’une enseigne puisse bénéficier a minima du label à une étoile, elle doit avoir au minimum 30 points.
Un référentiel co-construit avec des acteurs engagés
Certaines startups bien connues pour leurs actions en matière de lutte contre le gaspillage, comme Phenix ou Too Good To Go, ont participé à la création de ce label. Pour Jean Moreau, co-fondateur et directeur général de Phénix, « le but de ce label est de mettre en avant les bons élèves et de donner envie aux consommateurs de flécher leur consommation vers des magasins exemplaires ».
Indirectement, ce label va donc pousser chaque enseigne à faire mieux que sa concurrente. A uniformiser les efforts aussi. En effet, il arrive que les pratiques anti-gaspillage diffèrent énormément d’un magasin à un autre, même s’ils appartiennent à la même marque. La raison ? Les mesures anti-gaspillage résultent souvent de la volonté d’un groupe de collaborateurs qui font des efforts supplémentaires pour améliorer le cycle de vie des produits, là où d’autres préfèrent tout simplement les jeter à la poubelle. Le label est là aussi pour récompenser ces efforts.
Zéro gaspillage : une utopie ?
Les 9 millions de tonnes de produits alimentaires gaspillés chaque année représentent selon l’Ademe une perte commerciale de près de 16 milliards d’euros par an pour les acteurs de la GMS. Cela correspond aussi à environ 3% des émissions nationales de CO2 sur la même période. Les enjeux sont donc énormes. Pourtant, même si en matière de gaspillage il existe toujours une marge de progression, il serait faux de penser que les enseignes de distribution sont forcément de mauvais élèves. Au contraire. Toujours selon l’Ademe, la grande distribution est celle qui gaspille le moins (14%), si on compare ces chiffres aux 21% et 32% respectifs du secteur de la transformation et de la production.
De plus, même si les enseignes s’efforcent chaque année de grossir le nombre de tonnes de denrées alimentaires qu’elles donnent aux associations, certains produits ne peuvent pas être cédés. C’est par exemple le cas :
- des œufs périmés,
- des aliments ayant eu un contact direct avec le sol,
- ceux dont la chaîne du froid a été rompue.
S’il est impossible de quantifier précisément les volumes représentés par ces produits, ils sont assez conséquents pour arriver aux constats suivants :
- oui, tout doit être fait pour faciliter les mesures anti gaspillage
- non, le zéro gaspillage - eu égard de la réglementation actuelle en France – ne peut pas être atteint.
Le label renforcera les dispositions déjà en place
L’avènement du label national anti-gaspillage contribuera aussi à la réelle mise en application de règles déjà en place. Par exemple, la loi Garot interdit, pour les distributeurs alimentaires, de rendre impropres à la consommation des invendus encore consommables. La destruction de ces produits peut même entraîner une amende pouvant atteindre jusqu’à 0,1 % du chiffre d’affaires du dernier exercice clos, et la javellisation des denrées est punie d’une amende de 10.000 euros.
Aujourd’hui, les supermarchés de plus de 400 mètres carrés sont dans l’obligation de proposer une convention avec une association caritative. Toutefois, convention ne dit pas forcément distribution régulière. Il suffit que l’association passe récupérer une fois dans l’année les produits au sein de l’enseigne pour que celle-ci soit en règle avec le législateur. La solution ? Que chacun joue sa partition, bien entendu. Mais aussi systématiser les contrôles afin d’emmener les politiques anti-gaspillage à un niveau supérieur.