Les métiers de bouche peinent de plus en plus à attirer des profils et une nouvelle génération exigentes, diplômées certes, mais peu opérationnelle.
Pour les enseignes de la grande distribution, recruter des salariés n’est pas une mince affaire. Nombreux sont ceux qui regrettent une époque où les CV s’empilaient sur les bureaux. Une vieille époque dont plusieurs dirigeants et managers sont nostalgiques. Ce sont les nombreux échanges dans nos groupes de discussion qui nous ont alertés sur les difficultés actuelles du secteur à recruter dans les magasins. Managers comme dirigeants assurent que trouver des salariés compétents est plus complexe que par le passé.
Attention toutefois, le problème ne réside pas dans le nombre de CV que les magasins reçoivent. La réalité est même toute autre : « nous recevons énormément de CV, mais dans les faits, il y a très peu de candidats bien motivés », déplore cette manager de rayon, « le constat est plus complexe pour les métiers de bouche où c’est en effet de plus en plus compliqué », complète-t-elle.
Ces dernières années, nombre d’entre eux nous ont expliqué leur désarroi face à la situation : « c’est devenu l’enfer pour avoir des gens fiables et sérieux ». Pire encore, les exigences de certains candidats dépassent les contraintes du commerce : « on trouve des candidats qui ne comprennent pas pourquoi ils ne peuvent pas avoir leur samedi », explique ce manager, « d’autres veulent absolument terminer leur journée à 18h ».
Cette bataille dans cette quête de personnel, les cabinets de recrutement le confirment : « tous les rayons sont concernés », nous apprend dans un premier temps cette consultante en recrutement, pire, « je ne compte plus le nombre d’entretiens programmés et annulés au dernier moment sans nous avertir au préalable ».
Il y a toujours plein de candidatures. Les personnes sont soi-disant super motivées. Ils viennent une journée et parfois ne reviennent pas, sans donner de raison, sans prévenir (ou si juste un mail)…. Le rapport au travail a changé.
Des profils peu compétents et des jeunes qui sortent d’école peu opérationnels
Cette difficulté de recrutement reflète une autre réalité : « la difficulté ce n’est pas tant de recruter , c’est surtout que le niveau des nouveaux employés baisse chaque année, et que plus personne n’a envie de bosser dans le commerce », concède ce manager.
Cette faillite semble aussi provenir du système scolaire. « Nous avons beaucoup de jeunes qui sortent d’un BTS qui candidate à des postes de chefs de rayon », raconte ce directeur, « or, une fois sur le terrain, il faut tous leur apprendre et on se rend qu’ils ont la théorie, mais pas la pratique ». Certains jeunes actifs présentent encore d’autres lacunes : « je vois parfois des jeunes en entretien avec un bac pro. La plupart ne savent pas me calculer le prix au kilo d’une barquette de 500g à 2€ », raconte un autre directeur de magasin, « quand je vois ça, je sais déjà que je ne peux le garder et encore moins espérer les tirer vers le haut ».
Le constat n’est guère réjouissant. Il apparaît encore plus difficile de fidéliser des salariés dans le commerce, un secteur qui réclame parfois de bosser les jours fériés, les dimanches, et ce parfois avec des horaires variables, souvent très tôt le matin et/ou très tard le soir.
Le recrutement est devenu un casse-tête. Il devient impossible de trouver des gens fiables. Et même en laissant la chance à des débutants motivés “le premier jour … “, il n’y a parfois plus personne 5 jours après.
Pénurie de recrutement dans les métiers de bouche
Parmi les rayons les plus exposés à ces difficultés de recrutement, les rayons métiers souffrent. En tête de ligne, les rayons marée des magasins peinent à séduire les salariés de rejoindre les comptoirs. Cette difficulté concerne « tous les niveaux, d’employés à responsable », concède ce responsable dans un magasin indépendant.
Le drame est tel que dans certaines régions de France, certains magasins doivent même baisser pavillon et fermer le rayon poissonnerie faute de trouver des profils compétents.
En boucherie, le constat est le même : « certains bouchers, souvent inexpérimentés, réclament des salaires démesurés parce qu’ils connaissent la difficulté des magasins », explique de directeur, « sauf qu’ils ne tiennent 6 mois », regrette-t-il.
La difficulté de fidéliser et retenir les jeunes
Au milieu de tout ça, il y a toutefois comme une éclaircie. Car s’ils sont rares, les profils compétents, sérieux et motivés existent encore. Le problème provient de la méfiance des dirigeants à répondre aux exigences des magasins.
Malgré cela, les managers regrettent le manque de leviers des magasins pour les attirer et les retenir : « le problème souvent c’est que les bons profils ont le choix d’aller où ils veulent », explique ce manager qui regrette « ne rien avoir pour les motiver, ni prime pour récompenser, ni des possibilités d’évolution à court ou moyen terme ». Des jeunes, qui peu valorisés, finissent par changer d’enseigne en espérant que l’herbe soit plus verte ailleurs.
Pour ce cabinet de recrutement, « il y a même une rupture claire entre les recruteurs et les candidats », annonce, ce consultant avant de conseiller les enseignes « à mieux rémunérer dès l’embauche afin de justement garder et motiver leurs employés dès leur arrivée dans l’entreprise ». Le risque est parfois important pour les magasins, mais le droit exige encore « une période d’essai pour voir si un employé sera fiable ou non », complète cette consultante.