La grande distribution, acteur majeur de l’économie en France et en deuxième ligne dans cette crise provoquée par la propagation du Covid-19, risque d’être bouleversée. De nombreux paramètres et de nouvelles habitudes de consommation dans le quotidien vont apparaître, voire s’amplifier. Voici quelques tendances à prévoir pour cette sortie de crise.
Qui sait à quoi ressemblera la France après l’éradication du Covid-19 ? Plongé dans un confinement depuis près de 15 jours, le pays entre dans une forme de guerre qui restera dans les livres d’Histoire.
Ce confinement n’est pas sans conséquence et met déjà l’économie sur pause. Cette crise sanitaire que traverse le pays entraînerait une perte de 60 milliards d’euros pour l’économie française selon l’Observatoire français des conjonctures économiques.
Et quoi qu’il en soit – ou plutôt quoi qu’il en coûte – il apparaît avec une profonde évidence que les choses ne redeviendront jamais comme avant. De nouvelles tendances, apparues dans la période pré-confinement, ne vont faire qu’amplifier. De nombreux experts s’autorisent à dire que derrière la crise il y a toujours des opportunités pour imaginer le monde post Covid-19.
Il ne s’agit pas ici de tirer des conclusions hâtives. L’après Covid-19 entraînera à l’évidence de nouvelles façons de se nourrir, de consommer ou encore de produire. Les cours d’Histoire et d’Économie apprennent notamment que chaque crise s’accompagne d’une phase de récession, de destruction créatrice, puis d’une nouvelle croissance.
Ces changements sont des tendances potentielles. Certaines sont déjà observables depuis des années.
Le boom du e-commerce
Durant cette mise en quarantaine, les Français sont contraints par mesure de sécurité de rester chez eux. Seuls les déplacements de première nécessité sont autorisés. Parmi eux, les courses alimentaires. Les Français, plutôt que de se ruer dans les supermarchés et hypermarchés pendant le confinement, concentrent leurs achats sur les sites drive des enseignes de la grande distribution.
Et les Drive abondent de commandes. Régulièrement hors de service à cause d’un volume de connexions simultanées trop importantes, les structures e-commerce alimentaire tournent à plein régime durant le confinement. Si bien que pour valider une commande, quand auparavant il suffisait de 2h entre la validation de la commande et la récupération, il faut s’armer d’un peu plus de patience. Jusqu’à plusieurs jours parfois.
Le service du Drive est un des grands bénéficiaires de cette période de confinement. Bien instauré dans le quotidien des Français, il devrait se développer encore davantage à l’avenir.
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La livraison à domicile en plein essor
Comme le Drive, la livraison à domicile connaît une visibilité nouvelle. Durant la première semaine du confinement, la service à domicile a progressé de 90,2% selon le cabinet d’études Nielsen. Ce nouveau circuit d’achat porté notamment par des services comme Deliveroo connaît un regain de succès.
Au sein de la grande distribution, des services comme Shopopop, propose également une plateforme collaborative permettant la livraison de courses de particulier à particulier moyennant rémunération. Les enseignes de la grande distribution profitent également de cette période pour mettre en valeur ce service auprès des clients et désengorger les emplacements de réception des Drive.
D’autres acteurs de la consommation ont aussi initié cette pratique, comme les producteurs locaux ou encore des commerces de proximité afin de pallier à la chute de fréquentation. Rungis, le plus grand marché de France, s’est également adapté à cette crise pour livrer des produits frais au domicile des particuliers.
Une hyperconsommation puis un retour à l’essentiel
Beaucoup de spécialistes annoncent déjà une hyperconsommation à la fin du confinement comme un “rattrapage du temps perdu”. Cette période devrait durer un petit laps de temps, le temps aux restaurants, bars et autres commerces d’observer un afflux de clients.
Sauf que cette période intense risque aussi de redescendre rapidement. L’expérience du confinement permet à de nombreux Français de se recentrer sur les choses essentielles. Cela signifie qu’ils passeront moins de temps à des activités qu’ils jugeront inutiles.
Un retour au commerce de proximité et aux produits locaux
Les producteurs locaux souffrent déjà dans cette crise. Si la grande distribution est en première ligne de ce soutien aux producteurs en garantissant des fruits et légumes 100% Français dans les rayons des supermarchés, cela ne suffira peut-être pas pour sauver des producteurs déjà en proie à des difficultés économiques avant la crise.
Ce soutien revêt des accents solidaires qui va encore plus se développer. Cette crise pourrait être l’occasion de revenir à une consommation encore plus locale et plus responsable. Le message est déjà martelé par les enseignes de la grande distribution depuis des mois.
Une amplification des nouvelles habitudes de consommation
Depuis des années déjà, le comportement des consommateurs a profondément été bousculé. Plus sensible aux enjeux sociétaux et environnementaux, le Français a modifié ses habitudes d’achat, provoquant entre autres un déclin des hypermarchés et attirant une nouvelle fréquentation au sein des commerces de proximité.
En ce sens, les consommateurs, plus et mieux informés, font davantage attention à ce qu’ils achètent, que ce soit alimentaire ou non d’ailleurs. La sensibilité au gaspillage alimentaire, ou encore à la réduction de leurs déchets ont aussi donné naissance à de nouvelles pratiques et ont permis l’essor de solutions comme Too Good To Go ou encore Phenix.
La crise rendra les consommateurs encore plus exigeants qu’ils ne l’étaient ces dernières années. Un retour vers la qualité, vers plus de transparence, actionnera de nouveaux leviers pour les marques, pour répondre à ces nouvelles exigences.
Le marché de l’occasion poursuivra son développement
Le plaisir de la consommation risque d’en pâtir. S’il ne disparaîtra pas entièrement, il sera profondément bouleversé. Ces dernières années, les Français ont largement fréquenté les enseignes de vente de produits d’occasions. En 2018, 60% d’entre eux ont acheté de l’occasion.
De nombreuses enseignes se lancent sur ce créneau. E.Leclerc a déjà annoncé l’ouverture de points de vente Leclerc Occasion en 2020 et Carrefour a lancé Carrefour Occasion. Si la crise va sûrement retarder ces ouvertures, le développement reprendra.
Ce marché répond – et répondra – aux nouvelles attentes des consommateurs devenus moins matérialistes. En effet, les Français recycleront demain plus facilement des produits et objets dont ils n’auront plus l’utilité.
Une accélération de la transformation du monde moderne
Enfin, cette crise moderne oblige les entreprises à agir vite. Quand on reprochait aux entreprises traditionnelles une certaine inertie, on s’aperçoit que la réactivité est devenu le maître mot. C’est une question de survie. Au pied du mur, les entreprises cherchent de nouveaux leviers pour continuer à générer du chiffre d’affaires.
Jamais les décisions n’ont été aussi rapides dans des entreprises aux fonctionnements sclérosés. Cette crise est le marqueur que les modèles du passé doivent se réinventer.
Les enseignes de la grande distribution qui sont actuellement en train de modifier leur modèle vont devoir poursuivre leur efforts. En effet, les enseignes intégrées comme Carrefour, Auchan et Casino devront encore plus accélérer leur transition pour s’adapter au monde moderne.