Bienvenue. Tu as souhaité raconter ton expérience et présenter les spécificités certainement très intéressantes liées à un département d’Outre-mer.
Avant toute chose, peux-tu te présenter ?
Oui. Alors je suis rentré dans la grande distribution par hasard par le biais de l’ECAL à Rouen « Néoma business School ». Comme beaucoup je suppose, c’est un milieu que je ne connaissais pas et qui m’a de suite énormément intéressé. Le virus du commerce a été très contagieux pour moi.
J’ai pu faire beaucoup de stage. J’ai eu la chance de découvrir une multitude d’enseignes puisque je suis passé par Intermarché, un primeur, Super U, Carrefour Market, Hyper U, Carrefour Hyper, et ce dans tous les rayons possibles : fruits et légumes, poissonnerie, Frais LS, Épicerie et DPH. J’ai connu la Guyane en venant y faire mon stage de fin d’études en tant que manager DPH chez Carrefour (Groupe Bernard Hayot) et je m’y suis épanouis tout de suite. J’ai rapidement eu un rôle de commerçant et j’étais libre à 80% de mener mon rayon comme je le souhaitais. Que ce soit au niveau du prix, des négociations fournisseurs, ou encore de l’assortiment, etc. J’ai toujours trouvé ce métier très complet et le fait de se retrouver en Guyane n’a rien changé à la perception que je fais de ce métier. J’ai voulu revenir en France pour essayer de retrouver cette adrénaline que j’avais trouvée en Guyane. Toutefois, j’ai intégré un E.Leclerc en tant qu’adjoint épicerie et j’y ai fait 8 mois…et j’y suis vite repartis ! Aujourd’hui je travaille pour Géant Casino, groupe Ho Hio Hen.
Beau parcours ! Parlons maintenant de la Guyane, dont on imagine la gestion très différente comparée à la France. Quelles sont les spécificités que tu peux nous partager ?
Tout à fait. Alors oui la Guyane regorge de spécificités totalement inconnues en France. Pour les produits DPH notamment, il faut savoir que les Guyanais sont de gros consommateurs de lessive poudre. En 2 semaines, je peux faire passer pas moins de 20 palettes d’Ariel 105 et près de 1000 unités de Lénor ! C’est colossal.
Le Guyanais aime également les gros conditionnements en liquide vaisselle et en javel. Le papier toilette par 48 paquets ça fonctionne aussi très bien ici 🙂 Une de mes meilleures vente c’est celle des couches. Ici, elles représentent un fort levier de croissance car la Guyane bénéficie du taux de natalité le plus fort des départements d’outre-mer (proximité Brésil, Surinam avec l’immigration clandestine).
Enfin, le Guyanais est un redoutable chasseur de promo, bien plus qu’en France, et ici toutes mises en avant, promo ou non, s’arrachent.
Le client Guyanais semble bien plus coriace qu’en France semble-t-il 🙂 Parle nous maintenant un peu de ton métier : pour les commandes par exemple, comment ça se passe ?
Pour les commandes, c’est très différent de la métropole. Comme en France, le magasin travaille avec des fournisseurs locaux pour les marques nationales avec des délais de livraison en A pour B ou en A pour C. Nous avons des contacts privilégiés avec eux pour qu’ils soient réactifs et vice-versa. Il faut savoir que les fournisseurs ont leurs entrepôts aux Antilles. Leurs produits sont commandés par containers en métropole ou en Europe, acheminés puis stockés directement. Ça peut paraître étonnant, mais je peux très bien être moins cher sur la lessive poudre Ariel qu’en métropole (19,99€ en Guyane contre 24.89€ en France). En revanche, pour la MDD, nous passons commandes tous les 15 jours pour une livraison toute les 8 semaines. On reçoit l’équivalent d’un container.
Aussi, il faut savoir, c’est que peu de produits sur le DPH sont fabriqués en Guyane, mais deux usines de papier toilettes sont en cours de construction. Nos catalogues sont faits en Martinique, là où siège le Groupe Benard Hayot. Il n’y a pas d’engagement sur les quantités. Nous commandons ce que nous voulons et quand nous voulons pendant toute la durée du catalogue. Nos concurrents sont principalement Super U, Carrefour Market et Carrefour. Pour le management, il faut rester Zen ! De ce côté-là il n’y a pas de surprise, il faut être à l’écoute, faire confiance à son équipe et tenir sa parole. C’est comme en France.
Au fond, le métier reste le même. Malgré les contraintes géographiques, la logistique semble parfaitement rôdée. Je suis le premier surpris d’apprendre que les marques nationales possèdent leur propre entrepôt par exemple.
C’est vrai qu’il y a beaucoup d’idées reçues. Ici la région est en plein développement contrairement à la métropole où le marché est à maturité. Je voudrais juste rajouter aussi que je bénéficie d’une très grande indépendance dans mon travail. Je fais vraiment du commerce à l’état pur et bizarrement je n’avais pas retrouvé cet état d’esprit en France.
Avant de te remercier pour ton témoignage, as-tu peut-être une dernière anecdote à nous raconter ?
Oui je pourrais parler de mon métier pendant des heures ! Ce n’est pas vraiment une anecdote mais plutôt une particularité. Ici nous sommes les fournisseurs officiels des commerces de proximité. Pour l’exemple, ils peuvent parfois acheter des caddies entiers de bière Heineken, de Desperados, ou de déodorant Dove. Certains achètent même par deux ou trois palettes d’un seul coup !
Vraiment une belle découverte de savoir ce qui se passe de l’autre côté de l’Atlantique. Et qui sait, ton témoignage attisera peut-être de nouvelles aventures aux lecteurs du blog. Merci beaucoup à toi pour ce témoignage exotique