Les marques de distributeurs (MDD) ont connu une ascension fulgurante ces dernières années. Selon une étude Nielsen, elles représentent aujourd’hui 22 % des ventes en valeur des produits de grande consommation en France, contre seulement 15 % en 2009. Ce chiffre atteint même 35 % dans l'Hexagone, un niveau encore inférieur à certains pays européens comme la Suisse, où cette part frôle les 50 %. Mais qu’explique cette progression impressionnante ? Noël Zierski nous aide à comprendre les dynamiques derrière ce phénomène.
L'omniprésence des MDD est une évolution logique des marchés
« Dans les années 60, les Français ont découvert les grandes marques de consommation, à travers la publicité et les promotions », rappelle Noël Zierski. « Mais à un moment, on s’est rendu compte qu’on pouvait avoir des produits tout aussi bons – yaourts, pâtes, etc. – en marque de distributeur. » Cette transition, amorcée dans les années 90 avec des initiatives comme les « produits libres » de Carrefour ou les premières gammes MDD de Leclerc, a posé les bases de leur succès actuel.
La qualité au cœur de la réussite
Pendant longtemps, les MDD ont souffert d’une suspicion sur leur qualité. Mais cette perception a radicalement changé. « Aujourd’hui, la plupart des études, comme celles de Havas Commerce ou Nielsen IQ, montrent que les consommateurs considèrent les MDD au même niveau, voire presque au même niveau que les grandes marques nationales », explique Noël. Ce gain de confiance repose sur une amélioration constante des standards de qualité et une attention particulière aux attentes des clients.
Une alternative face aux tensions sur le pouvoir d’achat
Les MDD se positionnent aussi comme une réponse directe aux problèmes de pouvoir d’achat. « Chaque fois qu’il y a des tensions économiques, les consommateurs se tournent vers les MDD, car elles permettent d’acheter des produits à un prix raisonnable sans compromis sur la qualité », observe Noël. Que ce soit en 2022 ou en 2023, ces marques ont répondu présent face aux contraintes économiques.
Un potentiel encore inexploité
Malgré leur succès, les MDD disposent encore d’une marge de progression. « Les dix dernières années ont vu peu d’innovations dans ce domaine. Mais si les distributeurs se penchent sur de nouvelles stratégies, ils pourront rendre leurs MDD encore plus attractives », prédit Noël. De nouvelles politiques et initiatives pourraient consolider leur place dans les paniers des consommateurs.
Une pression croissante sur les marques nationales
Ce succès des MDD met à mal les grandes marques nationales. « Elles sont grignotées chaque année. Pour survivre, elles devront proposer quelque chose de plus, qu’il s’agisse de qualité, d’innovation ou d’une meilleure compréhension des attentes de leurs publics cibles », affirme Noël. Sans cela, ces marques pourraient perdre encore plus de terrain face à des consommateurs attirés par le rapport qualité-prix des MDD.
Le rôle des PME et la réindustrialisation
Un autre enjeu majeur est celui de la souveraineté industrielle et alimentaire. « La crise de la Covid-19 a montré les limites d’une trop grande dépendance aux importations. Les PME françaises ont une opportunité unique de se développer dans la grande distribution », insiste Noël. Soutenir les PME pourrait non seulement diversifier l’offre mais aussi renforcer l’économie locale.
Les MDD sont devenues un pilier incontournable de la consommation moderne, portées par leur qualité, leur accessibilité et leur capacité à s’adapter aux besoins des consommateurs. Mais leur progression pose de nombreuses questions sur l’avenir des grandes marques et sur les stratégies à adopter pour rester compétitif. Comme le souligne Noël Zierski, « les MDD ne sont plus une alternative, elles sont devenues une norme ».