Comprendre le monde topologique et les nouveaux enjeux de la proximité
Très rapidement, les sites industriels avaient comme objectif de pousser un produit physique généralement jusqu'au consommateur. Même les sociétés à Google, Amazon, sont développées pour essayer d'optimiser un flux, les conteneurs jusqu'au client. Ça allait bien dans un monde stable, je ne reviendrais plus dessus. Un monde topologique, c'est de dire que les distances ne sont plus par des lieux physiques, mais sont par un partage d'intérêts. Je vais te faire l'exercice. Si je te demande, quelle est ton adresse ? Quand tu demandes ça, tu vas avoir des gens qui vont te donner l'adresse postale ou l'adresse postale professionnelle. D'autres vont te donner une adresse email personnelle, un email de la famille, un email professionnel, etc. À chaque fois que l'on va te donner cette information, cette adresse, quelque part, on va définir dans quelle proximité on veut se mettre avec toi. Est-ce que l'on veut se mettre dans une proximité de livraison, etc ? Est-ce que l'on veut se mettre dans une proximité d'amitié, familière ou professionnelle ? Ça crée cette proximité et c'est quelque chose qui est encore très, très mal compris. C'est-à-dire que l'enjeu n'est pas être multicanal, omnicanal, et cetera. C'est un peu passé. L'idée est de dire que par rapport à ma proposition, quelle proximité je veux créer avec mes clients ?
Par rapport à ça, il faut d'abord décrypter, dans quelle proximité tes interlocuteurs veulent se mettre avec toi et ensuite, travailler ce niveau de proximité. Des gens qui partagent une passion, où qu'ils soient dans le monde, sont très proches entre eux. Des gens qui habitent à un endroit seront très proches du commerçant qui est juste en dessous. C'est un mixte de tout ça qu'il faut faire. Qu'est-ce que l'on pourrait prendre comme exemple ? On voit bien que la proximité avec Amazon, l'application super efficace, trois clics et tu as ton produit le lendemain matin dans la boite aux lettres, c'est une super proximité économique.
Tu as également à proximité un Lidl où tu as, je ne sais pas, 1500 points de vente en France, jamais très loin, un parking jamais très grand, des caisses toujours efficaces et un assortiment rapide qui fait que tu as un temps. Tu as une proximité par le temps qui est complètement acceptable si tu habites à côté. Puis, si tu as un Franprix à proximité en bas de chez toi, c'est une autre proximité où tu vas peut-être payer plus cher, mais c'est à proximité. Par conséquent, cette notion de proximité, aujourd'hui, est importante. Ce qui veut dire que l'on doit tous, aujourd'hui, travailler en écosystème. C'est-à-dire, quels sont les gens qui, autour de moi, ont intérêt à participer à l'échange ?
Cette proximité veut dire que l'on va se partager des avantages et des inconvénients. Tu t'es installé en bas de mon bâtiment, tu me fais des prix un peu plus chers, mais je suis d'accord parce que tu es en bas de chez moi. On peut prendre des exemples comme Amazon. C'est cette notion de proximité, qui est absolument à travailler, parce que souvent, elle est encore mal appréhendée. Pourtant, aujourd'hui, le monde est dans cette proximité. Ce qui fait que les règles que l'on avait établies depuis un siècle et demi, on va dire, elles explosent. On prend plein d'exemples. La société industrielle a fait en sorte que l'on sépare l'individu de son lieu de vie, de son lieu de travail. Pour un certain nombre d'activités, c'est en train d'exploser.
On revient à l'ère préindustrielle où il n'y avait pas d'anonymat. Dans un village, quand tu faisais quelque chose, tout le monde était au courant, quoi que l'on en dise. Là, c'est pareil. Pour faire court, dans ta sphère digitale, les gens vont voir ce que tu fais. Les gens qui sont à l'autre bout, ils s'en moquent. Pareil, tu peux prendre la blockchain qui est typiquement un protocole qui est vieux comme le monde. On veut faire une transaction, on ramène tous les villageois autour de nous, tout le monde voit la transaction qui reste dans la mémoire de chacun, et cetera. Aujourd'hui, repenser la proximité, c'est repenser les règles d'autrefois, mais avec des distances qui ne sont plus physiques.
Des distances qui sont topologiques, donc soit physiques, soit digitales, mais en tous les cas, qui sont par un partage d'intérêt. Par rapport à ça, il faut faire en sorte que chaque acteur de l'entreprise puisse travailler sa propre proximité, parce que cette proximité va agrandir et rendre plus résilient l'écosystème de l'entreprise. Ce sont des changements majeurs. C'est par cette proximité que l'on est en train de redécouvrir le covoiturage, le prêt entre voisins, l'occasion, et cetera. Le fait que les gens se reconnaissent et se disent bonjour alors que pendant des années, on a essayé de les anonymiser dans les magasins pour éviter d'avoir à les traiter personnellement, et cetera.
Parce que ce n'est pas un sujet en soi, pour moi. Le sujet, c'est la proximité. Quelle proximité tu proposes ? Par rapport à ça, quels sont les moyens que tu vas mettre en œuvre pour que ton audience puisse se créer sur ta proximité ? On peut parler des DNVB, mais on peut parler d'un ensemble d'acteurs. Ils n'ont pas d'interface, ils ont des API et ce sont d'autres acteurs qui vont servir de relais pour les atteindre. Quand tu prends des fabricants, des producteurs français, ils utilisent Amazon. Ils n'ont pas à développer d'omnicanalité. Dans la chaîne de valeur, ils ont juste intégré un acteur qui faisait finalement cet omnicanalité, en l'occurrence Amazon et qui va leur prêter.
C'est cette notion de dire que ce n'est pas automatique, il faut se reposer des questions, éviter d'utiliser les mots un peu communs. Typiquement, un autre exemple, le CRM ou Customer Relationship Management. Aujourd'hui, l'enjeu n'est pas de gérer la relation avec ses clients, c'est probablement de donner la possibilité à ses clients de gérer la relation avec la marque. C'est une notion que l'on appelle le vendeur Relationship Management depuis très longtemps. Globalement, c'est comment tu donnes la possibilité à ton client de piloter sa relation avec la marque ? C'est bien l'enjeu aujourd'hui. Par conséquent, si on voulait aller au-delà, c'est pourquoi demain les clients ne deviendraient pas des co-investisseurs de l'entreprise ?
Certains ont commencé à le faire. Il y a eu des marques qui ont commencé à faire en sorte que plus, tu es actif dans la marque et plus la marque se développe, plus tu as, derrière, du cashback. Tu participes au développement de la marque. Tous ces modèles en graphe, et non plus en modèle linéaire comme autrefois, on peut les réinventer. Les technologies avec de la blockchain, de l'IoT ou des identités décentralisées, sont là aujourd'hui. Il faut juste que dans notre état d'esprit, dans notre mode de pensée, on soit tous déstabilisés. Puis que l'on se demande si plutôt que de deviner à la place du client, on ne le laisserait pas la possibilité de nous dire ce qu'il veut ? C'est tout bon, mais ça existe rarement, et cetera.
Encore une fois, cette proximité doit être relative par rapport à l'activité de l'entreprise. De toute façon, on continuera à se déplacer. Un des sujets qui me tient beaucoup à cœur aujourd'hui, et je travaille avec un centre de startups sur ces sujets-là notamment, c'est comment on peut faire société ensemble ? Parce que l'on est bien sur une problématique. Il y a plein d'individualités au niveau économique, au niveau individu, et cetera., et on le voit bien aujourd'hui, c'est un peu dramatique, ce que l'on voit souvent. Comment faire en sorte que les gens puissent de nouveau ensemble s'associer pour créer de la valeur dans le respect des données de chacun ? Là, il y a des technologies qui permettent de faire ce genre de choses.
Plus que jamais, il faut donner facilité grâce à des outils, grâce à des initiatives. Dans le retail, il y en a un paquet. Souvent, je demande aux retailers, est-ce qu'ils sont allés voir les collectivités locales ? Est-ce qu'ils sont allés voir la régie des transports ? Plus on fera du lien qui aujourd'hui, est peut-être le collaborateur dans le magasin qui va détacher à 20 pour cent de son temps pour aller discuter avec les associations locales, avec la maison de retraite du coin, et cetera. C'est encore pareil. Quels sont tes invariants ? Si tu as un distributeur et que tu lui dis que plutôt que de refaire du stock, ou rester sur le carrelage, on le libère une demi-journée pour qu'il aille voir, peut-être, un certain nombre de clients et voir comment on peut optimiser la livraison pour qu'ils n'aient plus à se déplacer.
Soit, voir des activités locales pour organiser des livraisons organisées par la mairie ou travailler des sociétés du dernier kilomètre qu'ils font. Je ne sais pas, mais être créatif sur la distribution pour réduire l'impact sur l'environnement, faciliter la vie de chacun. Il y a plein de choses à créer dans la proximité, la technologie le permet aujourd'hui. Ça, c'est pour la description. Pour le commerce, on en a discuté, c'est qu'aujourd'hui, on commence à faire du i-shopping. Pourquoi les vendeurs points de vente, qui sont des experts, n'iraient pas chez les clients ? Je viens de finir ma piscine, j'invite mes voisins et un des vendeurs d'une marque va m'accompagner, va amener la bouteille et on va discuter.
Ça change la relation. Là-dessus, il y a tout un tas de startups. Il y a un moment où il faut être créatif. Je reprends un exemple. Tout ce que l'on a appelé pendant des années de l'e-commerce, pour moi, c'était de l'e-distribution. On allait généralement sur le web pour aller vite, on n'allait pas sur le web pour avoir du conseil. C'est un sujet. L'e-commerce, pour moi, il commence seulement à arriver avec l'i-shopping ou ce genre de chose, ou avec des solutions. Typiquement, le fait de mal utiliser les mots, ne permet pas de résoudre. Il n'est pas clair et ne permet pas d'être clair dans sa proposition de valeur.
Ça me fait venir à une question qui n'était pas préparée. On est un peu dans une société un peu encore individualiste et on tend vers une société un peu où l'intérêt général demeure. On voit des sociétés à missions qui émergent, notamment dans la distribution. Est-ce que tu penses que l'on va plus vers ça justement ?
C'est tout le défi, tout l'enjeu. De se dire qu'il n'y a qu'avec un collectif que demain, on pourra continuer à faire en sorte que la planète se développe et que l'on ait une vie heureuse. Globalement, dans un monde en graphes, il y a deux options. Soit, on développe ces écosystèmes et on se met dans des relations presque symétriques clients, fournisseurs, et cetera., voisins, voisins, et cetera., commerçants, commerçants et on partage. Récemment, je tenais encore à un événement sur comment mutualiser les moyens de livraison. On travaille en bonne intelligence, dans le respect des données de chacun, de la singularité de chacun, et cetera.
Je ne reviendrais pas dessus, mais tout ça se travaille avec la data. Chacun peut travailler sa singularité, mais dans une dynamique commune. On a les outils pour le faire. Je ne suis pas sûr que l'on ait la maturité au niveau des politiques, mais c'est un autre sujet. Pour avoir échangé avec pas mal d'entrepreneurs dans le retail, ils ont souvent cette sensibilité. C'est pareil. Je vais encore peut-être m'attirer les foudres de certains, mais mes interlocuteurs que je rencontre, il y en a deux types. Quand je me présente, je dis quand on a une minute, une heure, soit sept minutes, on la passe à résoudre un problème, soit on la passe à créer le futur. Généralement, quand on crée le futur, les problèmes du passé disparaissent.
Par conséquent, qu'est-ce que vous souhaitez faire ? Je ne souhaite que créer le futur. Ça ne m'intéresse pas de résoudre des problèmes. Pourquoi j'en viens là ? C'est qu'il est toujours très intéressant de voir quel est l'agenda de son interlocuteur. Est-ce que c'est un agenda à court terme pour résoudre un problème et dessus, il aura une commission ? Est-ce qu'il s'inscrit délibérément dans une démarche moyen, long terme ? Je me bats depuis des années sur la pression du court terme. C'est très bien que certaines personnes aient cette pression de la vente du trimestre, il en faut. Cependant, il faut également faire de la place pour ceux qui ont cette pression du long terme, cette urgence du long terme.
Il est très important pour moi de bien articuler les deux vitesses de l'entreprise. Il y a l'entreprise qui doit exécuter, ramener du revenu, être efficace. En parallèle, il doit y avoir l'entreprise qui participe au développement de la société, qui participe au développement de marché, qu'elle ait une vision, je dirais, moyen, long-terme. Dans les entreprises que j'ai croisées, j'ai toujours travaillé sur cette notion du moyen long terme, en bonne intelligence avec ceux qui travaillaient, entre guillemets, plus sur le court terme, sur la vente au trimestre, et cetera. Parce que c'est quand on a ces deux bien équilibrés que l'on peut à la fois être prévisible sur le court terme, mais en même temps, se positionner sur le long terme. Pourquoi je parle de ça ?
« Le sujet n'est pas d'imaginer. À aucun moment, pour être dans la technologie depuis 25 ans, il ne faut pas imaginer le futur, il faut juste le faire »
Parce que parfois, mes interlocuteurs sont uniquement obsédés par le court-terme. C'est très bien et il en faut, mais finalement ça ne va pas être les discussions que l'on a aujourd'hui, que l'on aura avec eux. Il est important de bien séparer et franchement, chez tous les retailers, j'ai trouvé justement ces deux profils. Encore une fois, les deux sont importants. Je m'adresse plutôt à ce concept urgence du long-terme. Je crois qu'aujourd'hui, en tous les cas, l'ensemble des acteurs doivent bien séparer ces deux mondes pour les faire travailler. Ils doivent les séparer d'un point de vue qui soit clairement énoncé, pour qu'ils travaillent ensuite, en bonne intelligence. Afin qu'il n'y ait pas de confusion, de mal-être pour les collaborateurs, de mésentente pour les clients ou pour le positionnement de l'entreprise dans la société, et cetera.
Le sujet n'est pas d'imaginer. À aucun moment, pour être dans la technologie depuis 25 ans, il ne faut pas imaginer le futur, il faut juste le faire. Le fait est que tu peux essayer d'imaginer où tu vas, mais ça ne sert à rien. Ce que tu peux, c'est avoir des valeurs et voir avec la technologie, avec qui on souhaite aller. C'est un petit peu différent.
En tant que personne de la technologie, mon obsession, et souvent, j'arrive sur ce terrain-là, est que je pense que l'architecture du modèle économique doit être aujourd'hui synchronisé avec l'architecture de son système d'information. Vous avez compris que le modèle économique est quand même quelque chose qui doit être assez structuré. Est-ce que l'on fait la distribution ? On est dans une société numérique, donc, quelle que soit la taille de l'entreprise ou son activité, un des enjeux aujourd'hui, c'est d'arriver à synchroniser l'architecture de son modèle économique.
Il faut qu'il soit clair, bien sûr, avec l'architecture du système d'information. Pour aller où ? Je ne sais pas, mais pour être dans le flux de cette économie de graphe. On est, aujourd'hui, moins dans une société de l'abondance, on est plutôt dans la société de la maintenance où dans tous les cas, on doit travailler le flux. On passe de l'abondance où on pouvait déverser à un modèle où on doit se mettre dans un régime en de flux. Par conséquent, abondance vers la maintenance. C'est différent, mais c'est fantastique à créer en fait.